Le présent colloque vise à poursuivre une entreprise de recherche d’histoire des sciences à laquelle le CERHAC a participé, et qui a abouti à une importante publication.
Sous la direction de Vincent Jullien, membre du Département de Philosophie de l’Université de Nantes, un groupe international de chercheurs a entrepris un travail collectif de réévaluation du mouvement scientifique relatif à la géométrie des indivisibles, des origines antiques et médiévales jusqu’à Leibniz et Newton, c’est-à-dire à la naissance du calcul intégral et du calcul différentiel. Cet ouvrage visait à dépasser les études générales déjà anciennes comme celles de Carl B. Boyer (The History of the Calculus and its conceptual Development, Dover, New York, 1959), ou de C. Edwards (The Historical development of the calculus, Springer-Verlag, New-York-Berlin-Paris, 1979), qui, quoique toujours utiles pour prendre une vue d’ensemble, sont devenues insuffisantes pour entrer dans le fond des méthodes des mathématiciens adeptes des indivisibles.
Ce recueil d’études coordonné par V. Jullien, a été publié en 2015, sous le titre Seventeenth-Century Indivisibles revisited, Science networks historical studies n° 49, Birkhäuser, Springer, 2015, 500 p.
Nous avons pensé nécessaire de donner une suite à cette entreprise en complétant ses acquis par un passage à un point de vue plus global, en envisageant l’emploi des indivisibles dans ce qu’ils comportaient de nouveauté, voire de ruptures à l’égard des mathématiques qui les ont précédées. Nous nous inspirons du programme de travail entrepris à la MSH de Clermont sur la notion de révolution, pour interroger les conditions dans lesquelles cette nouvelle forme de mathématique pouvait, à l’époque classique, être considérée comme révolutionnaire, et accomplir un changement radical dans les manières de penser et de travailler des mathématiciens ou apparaître au contraire comme une fausse révolution, une manière de donner à des « arabismes » une apparence de nouveauté et de validité. Des polémiques comme celles des P. Guldin et Lalouvère contre Cavalieri et Pascal, par exemple, sont emblématiques de ces aspects.
Cette perspective globale et les interrogations qu’elle suscite prendra donc en compte des aspects multiples : scientifique, technique, philosophique, rhétorique et littéraire. De nombreux problèmes se posent : la nouveauté du style, l’usage des nombres, les innovations linguistiques, et la manière dont, à l’époque, on écrit les mathématiques. Des développements pourront aussi être consacrés aux influences qu’ont eues les rivalités personnelles et l’esprit de combativité qui a animé les travaux et déterminé les formes nouvelles prises les publications des savants du XVIIe siècle.
Ces interrogations, appliquées à une époque particulièrement foisonnante en recherches intéressent aussi bien l’histoire des mathématiques, la philosophie des sciences et la rhétorique savante. Elles permettent la collaboration de spécialistes de domaines différents, qui ont pris l’habitude de faire converger leurs méthodes.